La construction de l’oléoduc stoppée

Bien que le juge se soit prononcé à l’encontre de la tribu sioux de Standing Rock

de Lynette Wilson et David Paulsen
Posted Sep 9, 2016

Les Épiscopaliens disent que les « manifestations » vont continuer

[Episcopal News Service] Le 9 septembre, un juge fédéral s’est prononcé contre l’arrêt des travaux sur une partie du projet d’oléoduc traversant quatre États, projet qui a déclenché l’opposition des Amérindiens du Dakota du Nord, attiré l’attention à l’échelle nationale et bénéficié du soutien, entre autres, des leaders de l’Église épiscopale.

Quelques heures plus tard, trois agences fédérales ont déclaré qu’elles arrêteraient la construction et ont demandé à l’entrepreneur, Energy Transfer Partners, d’« interrompre volontairement » les travaux sur les terres appartenant au gouvernement, terres que les chefs tribaux disent contenir des sites funéraires et des objets sacrés.

« Ce sur quoi il (James Boasberg, Juge de District des États-Unis) s’est prononcé n’a plus de raison d’être » déclare le Révérend John Floberg, chanoine missionnaire de la communauté de l’Église épiscopale qui se trouve sur la réserve de Standing Rock. « Le Département de la Justice, en conjonction avec le Département de l’Intérieur et le Corps of Engineers de l’Armée de terre, a demandé l’arrêt de la construction entre 32 km à l’est et 32 km à l’ouest du lac Oahe, jusqu’à ce que toutes les questions soient tranchées ».

Dans une déclaration du 9 septembre, les agences fédérales ont dit qu’elles arrêteraient la construction pour tenir compte des objections soulevées par la tribu sioux de Standing Rock et d’autres peuples tribaux concernant spécifiquement l’oléoduc de Dakota Access et de manière générale le « processus de prise de décision relatif aux oléoducs ».

« L’Armée de terre n’autorisera pas la construction de l’oléoduc de Dakota Access sur les terres fédérales sur la rive ou sous le lac Oahe jusqu’à ce qu’elle puisse déterminer s’il y a lieu de réexaminer l’une quelconque des décisions prises antérieurement en ce qui concerne le site du lac Oahe dans le cadre de la Loi NEPA (Loi de Politique environnementale nationale) ou d’autres lois fédérales. Par conséquent, la construction de l’oléoduc sur les terres du Corps de l’Armée de terre sur la rive ou sous le lac Oahe ne se poursuivra pas pour le moment ».

« Ce sont là d’excellentes nouvelles. Les intervenants présents ici au rassemblement de Bismarck ont déclaré que c’était une victoire » explique John Floberg, joint par téléphone alors qu’il participait à un rassemblement sur l’eau potable dans la capitale. « La décision du juge aurait autorisé le Corps de l’Armée de terre à faire avancer le projet mais ce dernier n’est pas obligé de délivrer le permis ».

La décision du juge était en réponse au procès intenté par la tribu sioux de Standing Rock qui s’opposait à l’approbation donnée par le Corps of Engineers de l’Armée de terre américaine à l’oléoduc de Dakota Access. Les Sioux de Standing Rock affirment que l’oléoduc traverserait des terres du traité, perturberait des sites sacrés et menacerait l’eau potable pour 8 000 membres qui vivent sur la réserve de la tribu de près d’un million d’hectares située juste au sud de l’endroit où l’oléoduc traverse le fleuve Missouri.

Energy Transfer Partners, la société basée à Dallas qui est à l’origine du projet d’oléoduc, rétorque que l’oléoduc est sûr, économique et nécessaire pour transporter le pétrole du Dakota du Nord jusqu’aux marchés et raffineries de l’ensemble du pays. Le 26 juillet, les organismes fédéraux de réglementation ont délivré des permis autorisant l’oléoduc de 3,8 milliards de dollars à traverser quatre États, à savoir le Dakota du Nord, le Dakota du Sud, l’Illinois et l’Iowa.

L’autorisation délivrée ce jour là a émue les gens sur le terrain dans le Dakota du Nord.

« Le rejet par le juge fédéral de la demande d’injonction de la tribu sioux de Standing Rock visant à stopper la construction de l’oléoduc de Dakota Access, suivi peu après par une déclaration commune des Départements de la Justice, de l’Armée de terre et de l’Intérieur allant dans le même sens, a provoqué chez nous qui sommes solidaires avec Standing Rock une montagne russe d’émotions » explique l’Évêque Michael Smith du Dakota du Nord. « Je suis d’accord avec ce qu’a dit Dave Archambault, le Président de Standing Rock, il y a quelques jours que « c’est le début d’un long processus juridique ». Dans le Diocèse du Dakota du Nord, nous sommes reconnaissants de l’appui que nous avons reçu dans ce combat de la part de toute l’Église épiscopale et nous savons qu’il faudra que cela continue. Nous continuerons à travailler et à prier pour un règlement juste et pacifique de cette situation difficile ».

L’Église épiscopale est solidaire d’autres actions en faveur de la justice autochtone et raciale et de la justice environnementale ; les Épiscopaliens de Standing Rock ont été présents aux manifestations depuis le début. Le 8 septembre, Heidi J. Kim, missionnaire de l’Église épiscopale pour la réconciliation raciale et le Révérend Charles A. Wynder Jr., diacre missionnaire de l’Église épiscopale pour la justice sociale et la défense des droits, se sont solidarisés avec les Épiscopaliens, la tribu sioux et des milliers d’autres défenseurs des autochtones, de la justice et de l’environnement sur le site de la mobilisation près de Standing Rock. Aujourd’hui, Heidi Kim et Charles Wynder ont rejoint John Floberg au rassemblement qui a lieu à Bismarck.

John Floberg a exprimé ses remerciements, pour le soutien qu’elles ont apporté à l’Église épiscopale, à l’Église anglicane du Canada, l’Église luthérienne évangélique en Amérique, l’Église méthodiste unie et l’Église unie du Christ qui ont toutes soutenues les opposants. (Cliquer ici pour obtenir le guide intitulé Episcopal Advocacy Guide to the Dakota Access Pipeline)

« La bataille juridique continue. Les manifestations vont se poursuivre » déclare John Floberg, ajoutant que plus de 200 peuples autochtones se sont également engagés à soutenir la tribu de Standing Rock. « Notre unité continuera et notre détermination à protéger l’eau et les droits du traité de la tribu de Standing Rock demeurent fermes ».

L’action des agences fédérales dans la foulée de la décision du juge prouve que Dieu œuvre de manière mystérieuse, déclare le Révérend Brandon Mauai, diacre épiscopal de la Réserve sioux de Standing Rock.

« La lutte continue. Cela [l’action des agences fédérales] prouve que nos prières sont entendues, de la manière la plus inattendue » ajoute-t-il. « Nous avons attendu que le juge fédéral se prononce et, lorsqu’il l’a fait, ce n’était pas en notre faveur. Puis le Département de la Justice est intervenu.

« Cela montre que Dieu continue d’entendre nos prières, tout comme on pouvait s’y attendre ».

Les agences fédérales ont également dit dans leur déclaration que l’affaire de Standing Rock met l’accent sur la nécessité d’avoir de réels débats sur la réforme qui a pour objectif de prendre en compte le point de vue des tribus dans « ce type de projets d’infrastructure ». Et notamment sur une meilleure manière de prendre en compte dans les décisions, les propositions des tribus relatives à la protection des terres et des ressources ainsi qu’aux droits du traité.

Les rassemblements et les manifestations vont au delà du Dakota du Nord. Les défenseurs de l’eau potable, les alliés des peuples autochtones et les sympathisants du mouvement No North Dakota Access Pipeline, hashtag #NoDAPL, ont organisé des rassemblements au niveau national. Une journée d’action nationale est prévue pour le mardi 13 septembre.

En prévision de la décision du 9 septembre, le Gouverneur du Dakota du Nord Jack Dalrympl avait la veille prévu la Garde nationale pour aider si nécessaire, les responsables locaux des forces de l’ordre à proximité du site de protestation de Standing Rock.

Le week-end dernier, la situation a dégénéré en http://www.democracynow.org/2016/9/7/standing_rock_sioux_tribe_s_lawyerviolences lorsqu’il y a eu des affrontements entre les opposants et des agents privés de sécurité engagés par Energy Transfer Partners. Les agents de sécurité ont fait usage de chiens et de gaz poivré à l’encontre des manifestants qui s’étaient réunis pour stopper la construction sur un site funéraire tribal sacré. Quatre agents de sécurité privés et deux chiens de garde ont également été blessés.

Le 6 septembre, le Juge Boasberg a accédé à la demande de la tribu de stopper provisoirement la construction sur la partie de l’oléoduc qui traverse le fleuve Missouri mais il a autorisé la construction à avancer sur le segment qui inclut le site funéraire.

Certains membres des congrégations épiscopales voisines ont rejoint les lignes de front des manifestations ou ont offert leur soutien aux centaines – et parfois aux milliers – de personnes qui campaient près de là où la société de l’oléoduc avait prévu de démarrer la construction.

L’affaire a pris une résonance particulière pour les Épiscopaliens qui soutiennent le peuple Dakota depuis leur exil du Minnesota au cours de la Guerre de 1862 entre les États-Unis et le Dakota. Il y a neuf Églises épiscopales sur la réserve de Standing Rock. Le 5 septembre, les églises ont publié une lettre exprimant leur solidarité avec le peuple sioux.

« Nous sommes appelés à être témoins. Nous sommes appelés à être fidèles au sein du peuple que nous servons » est-il dit dans la lettre. « Nous sommes appelés à être des gardiens de l’âme. Au milieu de cette épreuve, nous prions et œuvrons pour la réconciliation ».

Le Diocèse du Dakota du Nord a publié une déclaration le mois dernier exprimant son soutien à la tribu sioux de Standing Rock et l’Évêque Primat Michael Curry a suivi avec une déclaration de soutien, définissant l’opposition comme « une action qui allie le combat pour la justice et la réconciliation raciales à la justice climatique et à la sauvegarde de la création de Dieu dont nous sommes les gardiens ».

– Lynette Wilson est rédacteur et journaliste de l’Episcopal News Service. – David Paulsen est journaliste indépendant basé à Milwaukee (Wisconsin) et membre de la Trinity Episcopal Church de Wauwatosa.